mercredi, 12 juin 2013
Secte & cinéma : les illuminés des salles obscures
Article initialement paru sur RAGEMAG
La sortie de The Master en DVD a réveillé en nous le désir de léviter en pyjamas roses, couronnés de fleurs, purifiés par les larmes cristallines de notre rédacteur gourou en chef lors d'une cérémonie chamanique où nous répéterions en boucle des "Hare Krishna" en agitant des clochettes. Toi aussi tu veux baiser le cul du démon avant de lui offrir ta femme, ta fille et ta mère ? Choisis la Voie du Grand Ecran et rejoins les élus.
Chômage en hausse, violences scolaires, corruption politique, déforestation sauvage, guerre au Mali, attentats terroristes, conflit au Haut-Karabagh, meurtres d’enfants, augmentation du SIDA, nouvel album de Zaz, etc. Notre monde va mal, difficile de le nier.
Il n’est guère étonnant de voir les sectes en tous genres prospérer sur cette société anxiogène en proposant de soigner de la maladie de vivre. Privé de repères, souffrant de solitude, subissant la pauvreté ou la violence sociale, l’individu égaré est la cible favorite des gourous pervers qui offrent une grille de lecture simplifiée du monde. Le dogmatisme sectaire ne pouvait qu’intéresser le cinéma : le cloisonnement dans une contre-culture autarcique et la négation de la complexité du monde constituent des thèmes riches pour un art ancré dans la réalité, aussi inconfortable soit-elle.
Manipulation mégalomaniaque
Toute secte est liée à un gourou (ou presque : Landmark Education, par exemple). L’illuminé en chef sait comment appâter les faibles d’esprits. Patrick, le gourou de Martha Marcy May Marlene, a tout du hippie à la cool, travailleur des champs et chanteur folk, il séduit et embobine facilement les jeunes gens ayant fui leurs parents et leur condition sociale à la recherche d’une famille de substitution.
La communauté du film fait directement écho à « La Famille », la secte de Charles Manson fondée dans les années 1960 : l’organisation incarne la mère qui réconforte tandis que le gourou représente le père, c’est-à-dire la loi et l’autorité. Foncièrement pervers, le gourou fait de l’adepte un moyen dans le but de renforcer son système totalitaire. L’emprise sur le groupe passe par des rapports de dépendance et de sujétion. Patrick ou Lancaster Dodd procèdent de la même manière : ils désarment leurs victimes, les tiennent par la culpabilité, les caressent et les torturent sans raison. Repérant avec talent les failles et les faiblesses psychologiques de leurs victimes, ils exploitent jusqu’à l’os leurs blessures intimes, leur malaise et leur manque de liens affectifs pour en faire leur jouet manipulable à merci.
Un jouet sexuel notamment. Le gourou a un appétit sexuel à satisfaire, voyez-vous, et le génie de ces braves hommes est de convaincre que le viol est un idéal. C’est qu’ils doivent prendre des forces pour développer leurs pouvoirs extraordinaires faisant passer Chuck Norris pour un tétraplégique autiste : Shoko Asahara passait à travers les murs et méditait six heures sous l’eau, Sri Chinmoy a peint 100 000 tableaux, écrit 750 livres, rédigé 17 000 poèmes et faisait léviter des éléphants, Moon a rencontré Jésus et Ron Hubbard s’est rendu deux fois au paradis.
22:42 Publié dans Cinéma | Tags : ben wheatley, charles manson, chromosome 3, cinema, david cronenberg, david lynch, délire, eyes wide shut, folie, horreur, illuminé, indiana jones et le temple maudit, john carpenter, kill list, le locataire, manipulation, méditation transcendentale, paranoïa, prince des ténèbres, répulsion, robin hardy, roman polanski, ron hubbard, rosemary's baby, salles obscures, scientologie, secte, south park, stanley kubrick, steven spielberg, sylvain métafiot, terreur, the brood, the master, the wicker man, touristes, ragemag | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 24 mai 2013
Endless party
Ou quand Jay Gatsby rencontre Philippe Muray et les idées noires de Franquin.
« Ils ne font pas rien puisqu’ils font la fête. Et, de cette manière, la notion d’action négatrice du donné connaît une nouvelle existence parodique qui remplace avantageusement l’ancienne notion d’action disparue depuis longtemps. »
Après l’Histoire I
« Tant qu’il n’y avait pas identité entre monde et homme, il y avait Histoire. L’identité d’Homo festivus et du monde hyperfestif révèle la fin de l’Histoire. Cette identité supprime le désir qui avait fait l’Histoire. Cette fin n’est le nouveau commencement de rien. Les négateurs de la fin de l’Histoire sont ceux qui ont aussi le plus fait pour qu’elle s’arrête, en combattant la négation qui est la possibilité de sa perpétuation. L’individu qui clame que l’Histoire n’est pas finie tout en luttant contre les résidus de barbarie qui la faisaient exister est un personnage comique de notre temps. »
Le Portatif
Sylvain Métafiot
17:13 Publié dans Cinéma | Tags : endless party, the great gatsby, cinéma, fête, philippe muray, idées noires, franquin, homo festivus, dicaprio, après l'histoire, sylvain métafiot, new-york, le portatif, délire, mélancolie, gatsby le magnifique, francis scott fitzgerald, baz luhrmann, tobey maguire, danse, gouffre, stars | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 13 mai 2013
Cinéma : l’immortalité à travers les âges
Article initialement paru sur RAGEMAG
Devenir immortel, traverser les siècles sans conscience du temps, naître à l’âge des premiers hommes et contempler la destruction de la Terre, noyée sous le feu de la géante rouge dans cinq milliards d’années, transcender sa condition et fusionner avec le divin, qui n’en a jamais rêvé ? Succédant à la littérature et à la philosophie, le cinéma a su exploiter et retranscrire ce rêve fou de l’Homme défiant la mort. Un thème fantastique incontournable engageant l’obsession métaphysique suivante : la vie vaut-elle la peine de ne connaître aucune fin ?
« Que risques-tu ? Mourir ? Alors tu ne risques rien ». Les stoïciens ont toujours été de grands blagueurs. Comme si cette sentence ataraxique pouvait nous débarrasser de la peur muette de la mort. N’est pas performatif qui veut. « Aimer la vie et regarder la mort d’un regard tranquille », proclame Jaurès ? Plus facile à dire qu’à faire, mon cher Jean ! Car, qu’on le veuille ou non, personne n’accepte la mort. Tout le monde sait qu’il va mourir mais personne n’y croit. Tout un chacun n’est-il pas « un pauvre homme, comme tous les autres, qui est venu sur la Terre sans savoir pourquoi et qui refuse de croire qu’il va mourir », comme l’énonce tristement Faust dans La Beauté du Diable ? Peu sont ceux qui osent affronter la grande faucheuse en face, la majorité des individus craignant plus le décès de leurs proches que leur propre mort. Ainsi, malgré notre admiration pour le grand homme qu’était Jaurès nous ne pouvons que donner raison à La Rochefoucauld qui affirmait que « rien ne prouve davantage combien la mort est redoutable que la peine que les philosophes se donnent pour persuader qu’on doit la mépriser. » De lui également cette célèbre maxime : « Le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement. » Le contemporain chausse alors les lunettes postmodernes de l’hédonisme scientifique pour se protéger de l’incontrôlable tragédie qu’est la vie. Le vouloir-vivre ne saurait être indomptable. L’Homme a décidé de tromper la mort et va tout mettre en œuvre pour y parvenir, quitte à boire la tasse d’une soupe homogène et indifférente. Sans saveurs.
Pour oublier la mort, qui nous ronge inconsciemment, nous pouvons soit vivre intensément le présent, à l’infini, abolir le temps, aller vers l’anéantissement total et le nirvana des bouddhistes ; soit se lancer dans le travail sans fin, l’accumulation absurde d’argent et la frénésie consumériste. Succès incontestable et effets garantis de la méthode capitaliste tant l’abrutissement par le travail, le divertissement et la consommation sont d’une puissance incomparable. Tout le monde n’a pas la chance d’avoir pu s’élever spirituellement aux côtés de Bouddha en personne, comme John Oldman, et nombreux sont ceux qui se retrouvent complètement dépourvus lorsque leur dernière heure est arrivée.
15:50 Publié dans Cinéma | Tags : ai, âme, amor fati, andrew nicol, annie le brun, antonin artaud, appel d'air, borgès, darren aronofsky, divin, dorian gray, espérance de vie, éternel retour, fantastique, faust, fontaine de jouvence, gérard philipe, hédonisme, highlander, immortalité, indiana jones, intelligence artificielle, jaurès, john boorman, john oldman, l'homme bicentenaire, la beauté du diable, la rochefoucauld, lucrèce, lyrisme, maladie, matérialisme, michel simon, mort, murnau, nosferatu, oscar wilde, pale rider, posthumanisme, postmoderne, rené clair, richard schenkman, saint graal, science fiction, sokurov, surhomme, sylvain métafiot, the fountain, the man from earth, time out | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 15 avril 2013
Ill Manors de Ben Drew
Pour son premier film en tant que réalisateur, le rappeur Plan B, frappe plutôt fort. Avec Ill Manors il nous entraîne dans les bas-fonds de Londres, se frotter à la violence des quartiers Est, là où il a grandi, la rage au cœur et la peur au ventre. Le film navigue avec panache dans les eaux marâtres des « films de banlieues », à l'instar de La Haine, Boyz N the hood ou, plus récemment du viscéral Harry Brown dans lequel Plan B incarnait une racaille frappadingue. Le réalisme saisissant de ces films scotche généralement la rétine comme les papier gras collent aux barres d'immeubles. Ill Manors ne fait pas exception à la règle.
15:46 Publié dans Cinéma | Tags : ill manors, ben drew, cinéma, sylvain métafiot, film, la haine, violence, londres, gangs, drogue, banlieue, réalisme, rap, mankpad'ère, gazette, lutte sociale, enragé, meutre, brutal, crasse, poisseux, plan b, anglais, choral, gangsters, forest gate, caïd, loi du milieu, destins croisés, harry brown | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 09 avril 2013
Cinéma : cachez cette bande-annonce que je ne saurais voir
Article initialement paru sur RAGEMAG
Une fois n’est pas coutume, ce n’est pas la critique d’un ou plusieurs films que nous vous proposons cette semaine mais celle… d’une bande-annonce. Ou plutôt de l’archétype de LA bande-annonce, notamment américaine. Vous l’aurez sans doute remarqué, mais on assiste depuis quelques années à une véritable homogénéisation des trailers outre-Atlantique, principalement ceux des blockbusters, productions destinées au plus grand nombre. Petit décryptage.
14:35 Publié dans Cinéma | Tags : 8 12, alain resnais, ragemag, sylvain métafiot, alexandre hervaud, alfred hitchcock, alien, axel brücker, bande-annonce, blockbusters, boulevard de la mort, bruno dumont, camille claudel 1915, chefs d'eouvres, cinema, citizen kane, climax, comedian, david lynch, détective, docteur folamour, eraserhead, federico fellini, festival lumière 2012, g.i. joe conspiration, gremlins, grindhouse, h2g2 le guide du voyageur intergalactique, haikus, ironie, jack le chasseur de géants, jean-luc godard, joe dante, joseph kahn, l'affaire thomas crown, la cité des ténèbres, le miracle de la 34e rue, man of steel, millenium, oblivion, orange mécanique, orson welles, perles, planète terreur, prometheus, psychose, quentin tarantino, racoleur, ridley scott, robert rodriguez | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 28 février 2013
Cinéma : paye ta place à 15 euros, sale pauvre !
Article initialement paru sur RAGEMAG
L’info est passée relativement inaperçue et, pourtant, symptôme parmi d’autres d’une putasserie capitaliste, elle mérite qu’on s’y arrête : le Pathé Wepler, à Paris, inaugure le ciné à deux vitesses en proposant des billets premium pour 2 euros de plus. En gros, si après une journée de boulot tu décides d’emmener Cynthia, la nouvelle stagiaire, se faire une toile et que t’aimerais être bien posé (c’est-à-dire au centre de la rangée principale), eh ben il faudra raquer 2 euros en rab. Sinon ? Tu seras relégué aux tréfonds de la salle comme un vulgaire clodo incontinent.
13:57 Publié dans Cinéma | Tags : 15 euros, apartheid, ragemag, bourgeois, capitalisme, cheminots, cinema, clodo, cons, division, films 3d, françois ivernel, karl marx, ken loach, land of the dead, libéral, lutte des places, nantis, piratage, place premium, première classe, privatisation, prolétaires, révolution, romero, salles obscures, ségrégation, service public, sncf, tf1, the navigators, titanic, troisième classe, zombie | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 27 février 2013
Vice des belles âmes
« Sur quelque préférence, une estime se fonde,
Et c’est n’estimer rien, qu’estimer tout le monde. »
Alceste, acte I, scène I
C’est une légèreté grave qui parcourt Alceste à Bicyclette de Philippe Le Guay. Une comédie dramatique qui alterne les émotions comme les deux acteurs alternent les rôles d’Alceste et de Philinte. Une mise en abyme aussi drôle que mélancolique, taillé sur mesure pour un Fabrice Luchini ivre du texte classique, malicieux et d’une profonde tristesse résignée. Ainsi, Gauthier Valence (Lambert Wilson), acteur star d’un téléfilm ringard, se rend à l’île de Ré pour proposer à son vieil ami Serge Tanneur (Luchini), ancienne gloire du cinéma, de monter Le Misanthrope de Molière. Alternant les deux rôles principaux, les deux acteurs répètent pendant une semaine avant que Serge, hésitant, prenne sa décision.
01:30 Publié dans Cinéma | Tags : le misanthrope, molière, fabrice luchini, lambert wilson, alceste, bicyclette, philinte, langue française, beauté, empire du bien, hypocrisie, philippe le guay, île de ré, sylvain métafiot, cinéma, être contradictoires, tristesse, légèreté grave, comédie, dramatique, théâtre, joutes verbales, maya sansa, amour, amitié, egos, moeurs perfidies, paraître existentiel, fausse modestie, digne, plage | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 19 février 2013
Ennui sans fin
Jean Dujardin est en forme ces derniers temps. Après son affligeante émission « comique » sur Canal+ où, avec l'aide de sa bande de potes, il nous a gratifié du pire sketch au monde (« l'ours »), l'acteur JT-able par excellence récidive en jouant un espion russe portant un nom juif traquant une trader américaine à Monaco dans le navet d'Eric Rochant, Möbius. Pour être plus clair, Grégory Lioubov (Dujardin donc), un officier des services secrets russes est envoyé à Monaco afin de surveiller les agissements d'un puissant homme d'affaires, Rotovski (Tim Roth). Dans le cadre de cette mission, son équipe recrute Alice (Cécile de France), une surdouée de la finance. Soupçonnant sa trahison, Grégory va rompre la règle d'or et entrer en contact avec Alice, son agent infiltré. Naît entre eux une passion impossible qui va inexorablement précipiter leur chute.
Disons-le d'entrée de jeu, ce film est nul, plat, laid et prévisible. À l'instar du ruban qui inspire le titre, l'intrigue tourne en rond, se perdant en d'interminables va-et-vient entre des personnages aussi charismatiques que des endives au jambon. Autant Dujardin endosse à merveille le costume de cet espion tellement français qu'est OSS 117, autant les rôles dits « sérieux » où il campe des personnages torturés ne convainc absolument pas. Désolé, mais son rôle de Grégory Liubov, espion beauf tatoué au Club Med, on n'y croit pas une seconde. C'est surfait, surjoué, surinterprété, super chiant ! Lorsque Dujardin, fixe la caméra de son regard triste et anxieux on s'attend à ce qu'il nous sorte une vanne assortie d'une grimace afin de se dépêtrer de cette mare de sérieux dans laquelle il patauge, mais non ! Rien à faire, la mayonnaise ne prend pas. Son personnage est, par ailleurs, encore plus stupide que son équipe de bras cassés qu'il dénigre à tout bout de champ. Chapeau l'artiste !
Et que dire de sa partenaire Cécile de France, aussi mauvaise actrice derrière un ordinateur qu'en amazone sur le corps poilu de Moïse ? Rarement une scène de cul n'aura été si ridicule et si peu excitante. Il paraît qu'à la fin, Alice devient un légume suite à un empoisonnement : elle échappe à la mort mais ses yeux de veau reflètent une absence de conscience manifeste. Je dis « paraît » parce que je n'ai guère vu de différences avec son jeu durant tout le film.
Selon des sources inconnues, Émilie Dequenne jouerait également un rôle dans ce naufrage mais je n'en ai aucun souvenir. Quant à Tim Roth, outre le fait qu'on se demande ce qu'il vient faire là avec son ridicule accent russe, on sent vraiment qu'il s'emmerde à mourir, ne forçant absolument pas son jeu une moindre seconde. Je viens, je joue, je prends mon chèque, je me casse. Attitude la plus lucide à adopter sur ce tournage.
Ce film se prend tellement au sérieux qu'il est plus lourd qu'une bille sur une étoile à neutron. Et nous ne nous attarderons pas sur la référence, bâclée et insistante, à l'actualité politico-économique quant aux malversations des marchés financiers. Le pseudo message d'indigné du dimanche fait clairement déborder la coupe de l'exaspération.
Non vraiment, si vous voulez du bon Moebius, plongez-vous dans les superbes bandes-dessinées de Jean Giraud et rayez ce film de votre mémoire.
Une seule chose m'a mis du baume au cœur lors de cette éprouvante séance : ne pas avoir payé ma place.
Sylvain Métafiot
(cliquez sur l'image pour voir la bande-annonce)
15:25 Publié dans Cinéma | Tags : ennui sans fin, dujardin, nul, naze, sérieux, prétentieux, mobius, tim roth, eric rochant, cécile de france, espions, russie, monaco, lourd, mauvais, jean giraud, oss 117, cia, fsb, sylvain métafiot, cinéma | Lien permanent | Commentaires (5)
mercredi, 06 février 2013
Sans prendre de gants
N’en déplaise au père Spielberg mais son dernier film, Lincoln, sonne creux comme une poupée de porcelaine.
Trop hagiographique, trop lisse, trop désincarné, trop morne, trop long, trop de barbes touffues, trop trop !
Abraham Lincoln est représenté tel un héros sacrificiel se salissant les mains dans la fange et la corruption politicienne pour le bien de tous en faisant voter le XIIIe amendement interdisant l'esclavage. Mais si Daniel Day-Lewis assure une composition sans fard, l’intrigue n’est pourtant guère palpitante et manque singulièrement d’épaisseur politique. Plonger dans les méandres complexes de l’univers législatif américain, avec tout ce que cela comporte de technicité juridique et de stratégie politique, c’est ce qu’à réussit la série The West Wing de manière autrement plus passionnante (même s’il est difficile de comparer les 2h30 du film aux 110h cumulées de la série).
Un (petit) point positif tout de même : Lincoln aura eu au moins le mérite de briser la représentation manichéenne que l’on peut avoir sur le spectre politique aux Etats-Unis en rappelant, pour ceux qui l’ignorait, qu’au XIXème siècle le parti démocrate était esclavagiste. Le même parti qui fera élire Barack Obama deux siècles plus tard… Le film fait néanmoins l'impasse sur l'influence du socialisme utopique envers le seizième Président américain.
L’œuvre se veut donc plus pédagogique que filmique au sens où plutôt que de raconter des personnages, Spielberg donne à voir des symboles fédérateurs. Soit l’Histoire filmée à la manière d’un livre d’école par un élève trop bien appliqué. À l’instar de son héros, Spielberg aurait dû ôter ses gants, prendre plus de risques et moins de précautions.
Une bonne chose pour l’éducation historique. Moins pour le cinéma.
Sylvain Métafiot
(cliquez sur l'image pour visionner la bande-annonce)
01:56 Publié dans Cinéma | Tags : sans prendre de gants, sylvain métafiot, steven spielberg, hagiographique, lisse, froid, précautions, guerre civile, esclavage, noirs, film, cinéma, histoire, parti démocrate, obama, the west wing, daniel day-lewis, 13e amendement, stratégie politique, juridique | Lien permanent | Commentaires (4)
lundi, 04 février 2013
Orwell sur pellicule
Article initialement paru sur RAGEMAG
Œuvre contre-utopique par excellence, 1984 de George Orwell a depuis longtemps connue une prospérité indéniable dans les salles obscures. Pas tant en termes d'adaptation qu'en celui d'influence. D'Alphaville de Jean-Luc Godard à Matrix des frérots Wachowski, en passant par Brazil de Terry Gilliam et Equilibrium de Kurt Wimmer, petite virée dans le cauchemar orwellien sur grand écran. Mais pas que...
15:13 Publié dans Cinéma | Tags : orwell sur pellicule, 1984, aldous huxley, alpha 60, alphaville, bienvenue à gattaca, big brother, brazil, cauchemar, cinema, contre-utopie, dictature, equilibrium, george orwell, jean-luc godard, logique libérale, matrix, novlangue, pellicule, rationalité, science fiction, soleil vert, soma, sylvain métafiot, terry gilliam, thx 1138, totalitarisme, ragemag | Lien permanent | Commentaires (3)