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mercredi, 16 octobre 2013

Huis clos, le cinéma sans issue de secours

 

Article initialement paru sur RAGEMAG

 

Foin des grands espaces fordiens, des voyages intersidéraux ou des fresques historiques. L'humanité crue se dévoile parfois dans une cellule de six mètres carrés, en présence d'autres compagnons d'infortune, sans échappatoire. S'adaptant aux différents genres, le huis clos en tant que dispositif narratif et scénique confronte impitoyablement l'homme avec ses congénères et, pire, avec lui-même. Un carburant inflammable de situations souvent explosives ingénieusement employé par HitchcockLumet, Friedkin ou Polanski. Craquons une allumette.

 

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Une adaptation de la pièce a bien été réalisée par Jacqueline Audry en 1954 mais ne respecte pas l'unité de lieu et ne présente pas un grand intérêt, contrairement aux films qui vont suivre. Si enfer il doit y avoir on songera davantage à la chambre d'hôtel poisseuse de Barton Fink (1991) des frères Coen ou à l'appartement de Carnage (2011) de Polanski sur lequel nous reviendrons.

 

Justice for All

 

Genre fondamental, d’où provient le terme, les films mettant en scène la justice sont idéalement propices aux huis clos fiévreux. Sans surprise, la plupart des grands films mettant en scène la justice en action sont américains. Les hommes de loi, qu’ils soient juges, avocats ou policiers, fascinent l’Amérique, et provoquent plutôt les railleries en France.

 

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Qui mieux que Sidney Lumet a su filmer les rouages de la justice américaine ? Parmi ses huis clos, on pourrait citer Le Crime de l’Orient-Express (1974) et Un Après-midi de chien (1975), mais celui qui nous intéressera ici est son premier chef-d’œuvre, Douze hommes en colère (1957), qui s’immisce dans l’étouffante salle de délibération d’un jury devant statuer sur le cas d’un jeune homme accusé de meurtre sur son père. Vont-ils le condamner à mort ? Tous sont persuadés de sa culpabilité. Tous sauf un, le juré n°8 (Henry Fonda), simple citoyen tenacement en prise au doute, l’empêchant d’envoyer le gamin à la mort. Semant ce doute au sein des jurés, passablement énervés de devoir revivre le procès à huis clos et pressés de rentrer chez eux, la tension palpable se transforme en suspense sur l’issue du verdict que donneront les jurés. Toute l’intelligence du film tient à cette volonté farouche, démocratique, d’opposer un doute raisonnable aux préjugés expéditifs quand la vie d’un homme est en jeu. Ici, la pièce n’est pas verrouillée physiquement mais mentalement : les jurés ne pourront sortir qu’une fois unanimement d’accord. C’est le degré de volonté à faire émerger la vérité qui leur permettra de se libérer de cette étuve.


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Par exemple, La Corde se déroule exclusivement dans un appartement où un meurtre de sang froid a été commis par deux étudiants de New-York. Découpé en une dizaine de plans séquence reliés par des fondus enchaînés, l’histoire prend un tour macabre lorsque les deux assassins décident d’inviter des amis à dîner sur le lieu du crime, le cadavre de la victime demeurant dans un coffre au beau milieu du salon. Le suspense réside dans les gestes et paroles des personnages sur le point de découvrir l’horrible vérité, à savoir que deux jeunes gens convaincus de leur supériorité intellectuelle ont assassiné un de leurs camarades car ils le trouvaient trop faible, croyant appliquer à la lettre les enseignements de leur professeur Rupert Cadell (James Stewart), lui-même invité à la soirée.

 

…and Kill ‘Em All

 

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Souvenez-vous également de The Man from Earth, où de révélations en révélations, les différents protagonistes ne peuvent quitter le chalet sans connaître le fin mot de l’incroyable histoire révélée par John Oldman. Une sorte de brainstorming réunissant d’éminents professeurs d’université cherchant la vérité sur leur ami. Mais la rationalité n’est pourtant pas de taille face à certains mystères métaphysiques, même dans la réunion d’intelligences supérieures. Et puis, quand on parle de huis clos, on pense plus à un étripage chaotique qu’à un cours magistral. La promiscuité favorise la violence. Difficile de supporter son prochain de trop près et trop longtemps. Paradoxalement, l’être humain a besoin d’air et d’un peu de solitude pour faire preuve d’empathie. Sinon, ça dégénère en baston.

 

Des insupportables gamins de The We and the I (2012), de Michel Gondry, qui se délestent de leur cruauté et de leur bêtise à mesure que le bus se vide ; à l’étouffant hangar de Reservoir Dogs (1992), de Quentin Tarantino, où les gangsters tentent de reconstituer ce qui a merdé dans le braquage en s’accusant les uns les autres jusqu’à finir dans un bain de sang ; ou encore le final hallucinant et malsain de Killer Joe(2012), de William Friedkin, au sein d’une famille d’affreux, sales et méchants, force est de constater que les lieux confinés rendent dingue, poussant les protagonistes, au mieux à la prise de tête carabinée, au pire au combat rapproché façon « je t’arrache l’œil avec mes dents ».

 

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Carnage ensuite, adaptation truculente de la pièce Le Dieu du carnage de Yasmina Reza, et magnifique illustration des réflexes sauvages craquelant le vernis civilisé des gens bien éduqués. On notera, au passage, que le théâtre, huis clos par excellence, est un formidable pourvoyeur cinématographique d’affrontements psychologiques en espace réduit : Tape(2001), de Richard Linklater, adapté d’une pièce de Stephen Belber ; La Corde d’Hitchcock, basé sur la pièce de Patrick Hamilton ; Huit Femmes (2002) de François Ozon, issu d’une pièce de Robert Thomas ; Bug (2006) de William Friedkin, adaptation d’une pièce de Tracy Letts, etc. Mais revenons à notre Carnage.

 

Quand deux couples de parents bien propres sur eux se rencontrent pour régler un différent à l’amiable, l’affrontement prend vite le pas sur l’amabilité. Une malédiction semble peser sur cette rencontre : contretemps et incidents empêchent les quatre personnages de se séparer et, contraints de demeurer ensemble, ils se livrent à un petit carnage ménager aussi grinçant que jouissif. À travers ce dispositif simple mais efficace, Polanski fait voler en éclat les schémas traditionnels de communauté et de famille en opposant successivement chacun des personnages aux trois autres, dévoilant, de façon très pessimiste, l’absurdité de leur rencontre et de leur vie commune de couples.
L’impossibilité de quitter l’appartement opère comme un exutoire rageur des sentiments les plus enfouis. Les principes, la morale et les bonnes manières volent en éclats. Comme une envie de cracher à la gueule du monde moderne son hypocrisie humaniste et bien-pensante. De vomir sur cette culture bourgeoise pratiquant l’auto-masturbation dans les galeries contemporaines (on connaît le sort réservé à l’art contemporain par Yasmina Reza, depuis sa pièce « Art » en 1994). C’est aussi l’impossibilité de se soustraire au regard des autres, de vivre en fonction d’eux, alors qu’il n’y a rien à attendre de la société des hommes aujourd’hui.

 

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Mais même tout cela peut encore dégénérer d’un cran.

 

Master of horror

 

Le déchaînement des passions peut parfois se changer en violence bestiale. C’est là que nous basculons dans un genre délicieusement adapté au huis clos : le thriller horrifique. Quoi de plus flippant que d’être bloqué dans un manoir infesté d’esprits taquins et de tueurs psychopathes ? Peut-être de se barricader dans sa propre Panic Room (David Fincher, 2002) afin d’échapper à des cambrioleurs et de renverser inconsciemment le lieu censé garantir la sécurité en une prison domestique. Ou d’être enterré vivant dans un cercueil au beau milieu de l’Irak, comme dans Buried (2010) de Rodrigo Cortès. Et peut-être de se voir envahi par de minuscules insectes qui nous rongent de l’intérieur, ainsi que dans Bug de William Friedkin, chef-d’œuvre méconnu du film de genre, transpirant d’une paranoïa au degré jamais atteint.

 

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À la fatigante et puérile saga Saw, préférons celle d’Alien qui, notamment pour le premier et le troisième films, confronte Ripley à l’une, et une seule !, de ces sales bêtes venues du fin fond de l’espace. De fait, le mécanisme de la peur fonctionne bien mieux que dans les opus où les personnages font face à une véritable meute de monstres. Se sachant démunis et seuls dans un face-à-face avec l’intrus, la tension n’en est que plus vive. Le Nostromo devient un piège terrifiant dont il ne suffit pas d’ouvrir la porte pour s’enfuir (tout comme la base lunaire de Moon (2009), de Ducan Jones, retient prisonnier « l’immortel » salarié de l’entreprise Lunar, porté à bout de bras par un Sam Rockwell impressionnant ; ou la base minière de Io, une des lunes de Jupiter, dans Outland (1981), de Peter Hyams. Impossible de s’échapper, il faut donc détruire le huitième passager, l’autre, cette chose qui naît en nous et nous dévore. Le vivre-ensemble ? On le passe au lance-flammes !

 

On l’aura compris, difficile de cohabiter sans l’avoir souhaité. Ce ne sont pas les personnages de Résolution (2013), de Justin Benson et Aaron Moorhead, ni ceux de Cube(1997), de Vincenzo Natali, qui affirmeront le contraire. Ce dernier, petit bijou d’horreur SF, diablement intelligent malgré de très petits moyens, met en scène plusieurs personnages emprisonnés dans un cube sans savoir pourquoi ni comment. Résolus à s’échapper de cette prison futuriste, ils vont se rendre compte que le cube fait partie d’un ensemble beaucoup plus grand, un immense labyrinthe cubique dont nul ne sait qui l’a construit, où il se trouve ni quelle est sa fonction. Bourré de questions qui demeureront, heureusement, sans réponses (forcément décevantes), le groupe échoué découvre rapidement que certaines pièces sont piégées et ne laissent pas ressortir leurs occupants vivants. L’angoisse claustrophobique se double alors d’une frayeur de l’évasion : chaque pas pouvant être le dernier, il convient de réfléchir à deux fois avant d’avancer sans discernement.

 

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Au-delà de la violence extrême des pièges, Natali renverse le schéma logique des codes du genre : les personnages ne collent pas avec leurs professions respectives et les couleurs des salles perturbent les habitudes représentatives qu’on leur accole généralement. Faut-il renverser l’ordre pour accéder à une forme de compréhension ? Poussons l’interprétation au-delà du jeu sadique : parcourant les étapes de sa vie comme des pièces identiques, l’homme n’espère-t-il pas se libérer de cette monotonie quotidienne pour accéder à la conscience supérieure de son individualité ?

 

Au lieu d’intervertir un cube (un système) par un autre, ne faut-il pas s’extraire de tous les cubes interchangeables (le système et sa critique autorisée) pour devenir véritablement libre ? Rien ne sert de courir en rond si l’on ne trouve pas la porte cachée dans la forêt permettant de nous évader, n’est-ce pas M. Carax ?

 

Boîte noire

 

Sylvain Métafiot

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