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mardi, 11 octobre 2016

Éditions Le Feu Sacré : « La poésie c’est la littérature populaire par excellence »

 

Article initialement publié sur Le Comptoir

 

C’est au cœur de l’été 2011 que la maison d’édition lyonnaise Le Feu Sacré vit le jour, bien décidée à tracer sa route en dehors du « ventripotent milieu de l’édition ». Atypique, la dizaine d’ouvrages publiée depuis semble confirmer ce pas de côté éditorial où de denses petits essais littéraires côtoient un feuilleton « pop et alchimique », des poèmes exhumés d’Ossang et une mémorable analyse de l’œuvre de Philip K. Dick. Nous nous sommes entretenus avec son fondateur et directeur de publication, Fabien Thévenot.

Le Comptoir : C’est une paraphrase de Nietzsche qui orne le “fronton” de votre maison d’édition : « Malheur à qui fait croître le désert ». Le paysage littéraire contemporain vous semblait à ce point aride pour vouloir y remédier ?

Éditions le feu sacré,la poésie c’est la littérature populaire par excellence,sylvain métafiot,littérature,lyonFabien Thévenot : Je n’ai pas la prétention d’y remédier, juste de faire mon possible pour que survienne cette “littérature qui manque” — comme Deleuze parlait du « peuple qui manque ». Il ne s’agissait pas pour lui de compter sur un peuple préexistant mais littéralement de l’inventer : « Le peuple qui manque est un devenir, il s’invente, dans les bidonvilles et les camps, ou bien dans les ghettos, dans de nouvelles conditions de lutte auxquelles un art nécessairement politique doit contribuer. »

 

J’essaie avec mes maigres moyens de publier cette « littérature qui manque » pour le « peuple qui reste », celui qui s’intéresse encore aux pouvoirs révélateurs ou divinatoires de la littérature (et non pas au roman en tant que distraction, moyen de communication ou de produire du capital) ; une littérature à la fois contemporaine, ambitieuse mais accessible. Je n’ai pas la prétention non plus de réussir ce que j’entreprends, mais je suis mon intuition. Il y a beaucoup à faire.

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mercredi, 11 février 2015

L'invention de Morel ou la projection hallucinée

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Quel est ce parfum qui flotte autour du narrateur et l'obsède ? Celui, moite et âpre, de la flore de l'étrange île sur laquelle il s'est réfugié ? Celui de Faustine, ce fantôme charnel qui l'ignore superbement ? Ou bien celui de la folie, cette vapeur empoisonnée qui s'insinue dans son cerveau brûlé par le soleil ?

 

Le narrateur est pourtant rationnel, son journal en atteste. Mais si la science dépassait le cadre de la réalité, la folie qui en découlerait ne serait-elle pas la norme ? Les machines n'ont pas d'odeur et pourtant l'invention de Morel sent le souffre : diabolique, transgressive, parfaite. Au bout du conte, la question n'est pas de savoir si la frontière entre le réel et l'halluciné a été franchie mais s'il existe encore une frontière.

 

Le narrateur a fuit la prison des hommes mais se retrouve enfermé dans l'ombre d'un seul, le sien, condamné à revivre éternellement la plus pure des illusions. L'image est immortelle.

 

Sylvain Métafiot

mardi, 20 mai 2014

Bernanos et l’illusion de la liberté

 

« La Machinerie est-elle une étape ou le symptôme d'une crise, d'une rupture d'équilibre, d'une défaillance des hautes facultés désintéressées de l'homme, au bénéfice de ses appétits ? Voilà une question que personne n'aime encore à se poser. »

 

Georges Bernanos aimait le peuple. Cet amour transpire dans ses romans. Et c’est à la faveur des humbles contre les puissants que sa férocité pris corps. C’est pour défendre ce peuple modeste contre la barbarie de la technique, de l’argent et de la production illimitée que ses pamphlets virent le jour.

 

Si trois de ses œuvres romanesques furent adaptées au cinéma (Journal d’un curé de campagne de Robert Bresson en 1951, Mouchette du même Bresson en 1967, et le scandaleux Sous le soleil de Satan de Maurice Pialat en 1987), la déclinaison théâtrale fut plus rare.

 

Grâce soit donc rendue à Jacques Allaire pour l’audace de mettre en scène, au théâtre de la Croix-Rousse, deux essais trop méconnus de l’écrivain afin de « réveiller l’inquiétude » de nos contemporains : La liberté, pour quoi faire ? et La France contre les robots. Des textes politiques qui frappent à la gorge par leurs interrogations perçantes sur la société moderne. Bernanos nous heurte par ses remises en questions sur notre mode de vie effréné qui a détruit toute vie intérieure donc toute liberté. Son style flamboyant ne pouvait être déclamé que lors du bien nommé festival Les Grandes Gueules.

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