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samedi, 26 janvier 2013

En chute libre

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« À condition de se poster aux bons endroits, le touriste est plus facile à exterminer que la vipère »

Jonathan Swift

 

Quel animal plus pernicieux et répugnant que celui de touriste ? Cet être vulgaire et cuistre ayant comme unique but de comparer les merveilles qu’il visite au guide de voyage qu’il trimbale partout, au lieu de les contempler. Ce lourdaud pathétique s’extasiant devant les devantures en toc des magasins censés reproduire la « culture d’origine » du pays qu’il visite. Ce beauf fatiguant, trépignant d’inquiétude s’il ne retrouve pas son McDo et son feuilleton préféré à l’autre bout du monde ; parce que le pauvre bichon est perdu sans les repères qui servent de boussoles à sa vacuité existentielle. Bref, cette part honteuse de l’être humain dont il serait bien prétentieux de s’exclure.

 

Ben Wheatley semble partager cette opinion puisqu’il nous gratifie, après le terrifiant Kill List, d’une savoureuse comédie, noire comme la gueule d’un mineur d’un film de Ken Loach, drôle comme un sketch de Benny Hill sous acide et méchant comme une rombière un samedi de soldes : le bien nommé Touristes.


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Les touristes ce sont Chris (Steve Oram) et Tina (Alice Lowe), décidant de partir visiter les merveilles de la campagne anglaise en caravane. Dieu seul sait pourtant ce que la perfide Albion a de merveilleux si ce n’est ces avantages fiscaux mais, ahem, on s’égare. Le film démarre donc comme un road-movie sympathique bien qu’emprunt de ce réalisme anglais gris montrant la classe populaire dans son quotidien plutôt morne et gris. L’introduction, dans la maison de la mère (ultra possessive) de Tina, d’une ambiance lourde, nous fait d’ailleurs craindre un instant de visionner un énième film social anglais bien lourd. Non pas que le genre nous déplaise mais on est entré dans cette salle obscure pour rire, nom d’une pipe !, et on ne va pas être déçu.

 

Les préparatifs étant faits, notre couple de jeunes amoureux quittent le Yorkshire, direction le musée du tramway pour s’éclater un grand coup. Mais confrontés à des individus encore plus antipathiques qu’eux (Chris est un roux psychorigide et Tina est une vieille fille qui adore le tricot et son chien) la promenade vire au drame. La chute s’amorce.

 

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C’est là que le film prend un virage salvateur en dérapage incontrôlé. La comédie se teinte de rouge. Non pas de la couleur des révolutionnaires en goguette mais de celle du sang des emmerdeurs croisant leur chemin. Car si Chris et Tina sont un peu beaufs sur les bords, ceux qu’ils croisent tiennent le haut du pavé dans la bêtise humaine : gros dégeulasses, bobos prétentieux, écolos fanatiques, hippies crasseux et bruyants, poufs de comptoir, lecteur du Daily Mail. Du moins, c’est ce qu’on pourrait penser après les premiers meurtres mais la vérité est plus cruelle : les deux tourtereaux ne cherchent pas à rendre le monde meilleur en le débarrassant des imbéciles qui le peuple, comme dans God Bless America. Non, ils éliminent simplement ceux qui se trouvent au travers de leur route, ceux qui les gênent dans leur but. Quel but ? Le plus beau qui soit : être ensemble, rien que tous les deux. Et fuck le monde ! Car, malgré ses apparences morbides, Touristes est avant tout un film d’amour. Un film d’amour sur deux sociopathes criminels mais un film d’amour quand même.

 

À noter, la résurgence d’une certaine violence païenne, déjà présente dans Kill List, qui semble habiter Chris peu après un éclatage de crâne. Le film procède ainsi par de brèves montées d’adrénalines du fait de l’imprévisibilité de nos deux tueurs amateurs. L’atmosphère froide des environnements parcourus serait pesante si l’humour noir ne permettait de relâcher la pression. Un équilibre très efficace.

 

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Là où God Bless America loupait quelque peu sa cible en tombant dans les travers qu’il dénonçait (tant sur la forme avec son esthétique cool que sur le fond avec sa leçon de morale finale à deux balles), Touristes assume son côté nihiliste, amoral et destructeur en faisant de Chris et Tina de vrais tarés avides de meurtres (tous plus sanguinolents les uns que les autres). Tina, que l’on croyait d’ailleurs la plus réservée et sensible du couple, devient carrément folle à lier (par frustration sexuelle ou désir meurtrier ?) en écrasant un jogger par jeu puis en envoyant valdinguer le nouveau pote de Chris dans un ravin sans aucune raison. Ainsi, Touristes prend le contre-pied des drames sociaux anglais en montrant la stupidité du peuple, ses préjugés, sa vulgarité, sa mesquinerie. La médiocrité ambiante en prend pour son grade. On est loin de la décence ordinaire chère à Orwell mais rappelons que c’est une comédie, aussi cruelle que réjouissante.

 


 

Bien évidemment, une telle hécatombe ne pouvait finir que tragiquement. Qui patauge dans le sang finit par se noyer dedans. Contrairement au film de Bob Goldthwait, nos deux anti-héros ne concluent pas leur périple meurtrier par un final grandiloquent à coups d’AKA 47 mais d’une manière autrement plus romantique : ensemble jusqu’au bout. Sauf… si l’un des deux lâche l’autre au dernier moment. Filmée en caméra subjective, même l’amour tombe de haut. Le film de Ben Wheatley est une chute (hilarante), dont l’atterrissage final est définitif.

 

Sylvain Métafiot

 

Commentaires

 

Je suis bien d'accord avec ce que tu écris, notamment sur le fait que le film n'est pas moraliste. Mais hormis le défonçage de fâcheux, il n'y a pas grand chose de plus. Du coup, l'intérêt de ce genre de film reste pour moi limité au plaisir du visionnage qui disparaît quelques jours après la séance. Je dis ça comme une généralité mais ce n'est pas toujours vrai : In The Loop n'est sans doute pas un grand film politique mais c'est tellement drôle qu'il supporte plusieurs visions. Dans ce cas, ce sont peut-etre tout simplement les gags de Touristes qui ne m'ont pas paru assez bons...

 

Oui, Nolan, le film n'est certes pas aussi marquant que d'autres grandes comédies (j'étais d'ailleurs passé à côté d'In The Loop, qui a l'air savoureux) mais j'ai particulièrement apprécié le mélange entre ultra-violence et humour potache, le tout enrobé dans une satire noire de la classe moyenne.
En cela le cocktail grinçant fonctionne bien.
Au passage, en parlant d'ultra-violence, il me semble avoir reconnu la version accélérée de l'ouverture de Guillaume Tell de Rossini dans la bande-annonce d'In The Loop, version également présente dans Orange Mécanique de Kubrick.

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