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vendredi, 08 novembre 2013

Lionel-Edouard Martin : « La poésie doit transformer la chose vue en musique »

 

 

« Il n'est d'écriture que dans un ressenti particulier de l'univers, où les mots appellent, au-delà des êtres et des choses, un monde épuré de substance, où les corps sont de gloire et tiède la pierre – abolies frondes et catapultes. »

Lionel-Édouard Martin, Brueghel en mes domaines



Vous êtes l'auteur d'une vingtaine de livres et malgré une reconnaissance critique indéniable vous demeurez quasiment inconnu du grand public. Comment expliquez-vous cela ?

Je crois qu'il y a plusieurs raisons à cela. La première serait de dire que je n'écris pas pour le grand public. L'autre raison est que je publie dans des maisons d'éditions qui, sans être confidentielles, sont moins distribuées que certaines autres maisons de plus grande importance. Sur la vingtaine de livres que j'ai écrits il doit y avoir pour moitié des romans, qui sont ce qu'ils sont. L'autre moitié on peut les appeler des poèmes s'il l'on veut. Moi j'appelle ça des proses poétiques courtes. La poésie actuelle en France est peu lue, méconnue, les maisons d'édition peinent à faire connaître les auteurs. Évidemment, on peut citer quelques poètes contemporains qui ont une petite notoriété auprès du grand public. À côté de ce qu'on peut appeler « les grands ancêtres », comme Yves Bonnefoy, les gens de ma génération sont un peu méconnus.

 

Cela est-il dû à la rigueur et la richesse, peu communes, de votre prose ?

lionel edouard martin,lecture,poésie,jazz,nourriture,matériel,musique,littérature,sylvain métafiot,vampire actifC'est toujours difficile pour un auteur de se prononcer par rapport à cela. J'aurais tendance à dire que je ne sais pas écrire autre chose que ce que j'écris. Je n'ai pas envie d'écrire autre chose que ce que j'écris. Cela ne pose pas, a priori, d'état d'âme. Cela en pose, en revanche, pour mes éditeurs quant aux retours sur investissements [rires]. Pour un auteur c'est tout de même un souci que certaines maisons d'édition acceptent de prendre le risque de publier ce qu'il écrit. Toute la question est là. J'ignore si c'est à cause de la difficulté de mon écriture qui tranche un peu par rapport à d'autres écritures contemporaines sans doute plus simples ou plus faciles à lire. Aujourd'hui on aime une écriture plus compacte. Mais ce n'est pas pour autant que tous les auteurs se conforment à cette espèce de moule que l'on veut imposer, c'est-à-dire sujet/verbe/complément et c'est tout. Il semblerait que cela soit plus facile à lire, qu'un certain vocabulaire pauvre doive s'imposer s'il l'on souhaite toucher un public plus large. Moi je ne sais pas faire cela. J'ai besoin d'avoir un vocabulaire précis. Le français est une langue riche autant faire avec. Certes, en employant une métaphore musicale on pourrait me demander : pourquoi ne pas jouer de plusieurs instruments ? Le flûtiste que je suis répondrait : il faut quasiment toute une vie pour maîtriser toutes les possibilités d'un instrument. Par exemple, si l'on veut passer au jazz il y a des sonorités improbables que l'on découvre par soi-même. Pour la langue française c'est la même chose. On peut s'en servir de façon simple mais on a un instrument d'une telle richesse qu'on pourrait l'exploiter et le découvrir de toutes autres façons. Je ne vois pas pourquoi un joueur de jazz devrait jouer des mélodies simples.

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mardi, 03 août 2010

Le sophisme du rat

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Enoncé simplement, ce sophisme est on ne peut plus enfantin : « Rat » est composé de trois lettres. Le rat mange le fromage. Donc trois lettres mangent le fromage.

 

La forme latine de cette idiotie est plus convaincante car en latin les articles n’existent pas : la confusion entre le mot « rat » et l’animal était donc moins tirée par les cheveux. Evidemment, personne de sensé, semble-t-il, ne se laisserait prendre à un piège aussi grossier. Et pourtant, le sophisme du rat illustre une erreur très commune : la confusion entre l’ordre symbolique des mots et l’ordre réel des êtres et des choses. Exemple très simple : un lecteur de dictionnaire oublie (à condition qu’il l’ait su, ce qui n’a rien d’évident) qu’il lit des définitions, c’est-à-dire des traductions d’un mot en d’autres mots, et croit qu’il a affaire à des présentations de choses. Ce n’est pas l’animal réel qui est défini à l’article « onagre : âne sauvage », mais le mot « onagre » dont on propose l’équivalent lexical « âne sauvage ».

 

Sylvain Métafiot