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samedi, 03 juillet 2010

Les petites phrases des philosophes

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Qui n’a jamais essayé de briller en société, que ce soit lors d’un diner, dans un débat, entre amis ou en famille, en citant tel ou tel grand penseur des siècles passés ? Mais avant de citer Pascal, Camus ou Platon, mieux vaut savoir de quoi l’on parle. Ce qui est rarement le cas… Petit panorama des erreurs d’interprétation, contradictions, contre-sens et autre fourvoiements de la pensée de philosophes, dans lesquels la majorité d’entre nous se vautrent, sans parfois sans rendre compte…

 

« Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien » Socrate


Le père des philosophes avouant son ignorance ? En quelque sorte… Avec ironie, il affirme que celui qui dit savoir ignore tandis que celui qui dit ignorer sait, car le premier ne sait même pas qu’il ignore tandis que le second sait au moins cela. Un beau paradoxe et une belle leçon d’humilité.


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« Connais-toi toi-même » Socrate


La fameuse introspection antique que tout le monde connaît…mais que personne ne comprend ! Nulle introspection ici. Cette inscription sur le fronton du temple d’Apollon à Delphes que Socrate avait pris pour devise ne nous exhorte absolument pas à sonder la profondeur de notre âme, à la recherche de notre moi profond. Non non ! Il nous pousse plutôt à connaître notre place dans le monde. Il ordonne aux hommes de ne pas oublier qu’ils ne sont pas des dieux, qu’ils sont voués à la mort. « Sache où est ta place et tiens-toi y » en somme.

 

 

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« Je pense donc je suis » René Descartes


Le fameux Cogito ergo sum ! Il s’agit ici d’une réflexion sur le doute que l’on trouve dans la quatrième partie du Discours de la méthode. Cela se traduit par la certitude de la conscience de soi. C’est, pour Descartes, le premier principe indubitable de la philosophie. On peut douter de tout mais pas de sa pensée elle-même puisque douter, c’est penser. Or, penser, c’est exister comme être pensant. On peut douter que l’on a un corps mais pas que l’on est un être pensant.

 

 

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« Les vices privés font la vertu publique » Bernard Mandeville


Curieux paradoxe, n’est-ce pas ? Pas tant que ça. Cette thèse de l’utilité sociale de l’égoïsme fut développée dans La fable des abeilles en 1714. L'égoïsme pousse à agir, tandis que la morale invite à la léthargie. C'est donc la dynamique des intérêts particuliers qui stimule la prospérité d'une société, selon le théoricien néerlandais qui a inspiré Adam Smith. Ainsi un libertin qui agirait par vice ferait profiter l’intérêt général car « sa prodigalité donne du travail à des tailleurs, des serviteurs, des cuisiniers et des femmes de mauvaise vie, qui à leur tour emploient des boulangers, des charpentiers, etc. ».


 

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« L’homme est un loup pour l’homme » Thomas Hobbes


Cette formule, qui est initialement celle du poète comique latin Plaute (Homo homini lupus) est présente dans l’ouvrage phare de Hobbes, le Léviathan. Dans la première partie précisément où il développe une conception matérialiste et pessimiste de l’homme : celui-ci n’est pas l’être de raison décrit par les stoïciens mais un être de passions violentes. Il appelle état de nature cette situation de violence extrême exacerbée par cette fondamentale égalité : sans pouvoir pour les contraindre et les retenir, les hommes jouissent de l’égalité de donner la mort à quiconque, car ceux qui ne disposent pas d’une grande force physique peuvent toujours user de ruse ou de trahison.

 

 

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« La religion est l’opium du peuple » Karl Marx


Hum, la religion comme drogue qui fait délirer les hommes ? Raté ! Au milieu du XIXème siècle, l’opium était utilisé comme sédatif et antalgique. Marx conçoit que la religion permet d’apaiser les tensions de la société, comme l’opium calme l’individu. Elle soulage les individus de leurs souffrances. Mais ce qui le désole c’est que ce soulagement soit éphémère et artificiel, donc illusoire. Et cette illusion ne fait que prolonger la souffrance réelle, puisqu’elle ne fait rien pour s’attaquer à ses causes.

 

 

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« L’enfer c’est les autres » Jean-Paul Sartre


Ah, ce vieux loup solitaire de Sartre dénonçant la compagnie des autres, l’insupportable présence d’autrui. Que nenni ! Dans sa pièce de théâtre Huis clos, trois personnages se retrouvent après leur mort dans une chambre d’hôtel (l’enfer). Etre mort c’est être réduit à l’ensemble de ce que l’on sait sans rien pouvoir y changer. La fameuse phrase signifie que la mémoire des vivants est la seule au-delà des morts (être mort, c’est être en proie aux vivants, c’est ne plus pouvoir donner un autre sens à ce que l’on a dit, fait, été).

 

 

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« La langue est fasciste » Roland Barthes


Attention, Mussolini a envahi le Larousse ! Non, fausse alerte. Barthes dénonce, « seulement », l'hypocrite clarté de la langue classique, l'illusion de naturel et de vérité qui fait d'elle en réalité l'arme invisible des dominants, leur idéologie. C’est lors de son premier cours au Collège de France, en 1977, que le nouvel élu affirme : « La langue, comme performance de tout langage, n'est ni réactionnaire ni progressiste ; elle est tout simplement fasciste ; car le fascisme, ce n'est pas d'empêcher de dire, c'est d'obliger à dire. » Avant qu’il ne la juge « essentielle » (la joie éphémère des textes), au crépuscule de sa vie.

 

 

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« Dieu est mort » Friedrich Nietzsche


Plus personne ne croit en Dieu ? Il n’y a plus de religion ? Même pas ! Le diagnostic que livre Zarathoustra (le prophète du surhomme, le porte-parole de Nietzsche), signifie que les valeurs sur lesquelles désormais repose notre culture ne sont plus religieuses. Même les prétendus « croyants » ne croient plus au péché ou au salut de l’âme…

 

 

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« La prison a l’avantage de produire de la délinquance » Michel Foucault


Pour le théoricien du biopouvoir, la prison, loin de réduire la délinquance, s’inscrit plutôt dans une théorie de la surveillance généralisée de la société sur ses membres. La détention provoque la récidive. C’est le constat auquel il se livre dans La société punitive, Dits et écrits (II) : avec un taux de récidive s’élevant à 52 %, les prisons, loin d’être délaissées, souffrent de surpopulation. La catégorie de population que constitue la délinquance se révèle finalement bien moins dangereuse qu’une somme d’irrégularités individuelles. Si la prison échoue à supprimer le crime, elle réussit à produire une forme d’illégalisme contrôlable, et même récupérable. Du recyclage, en somme.

 

Sylvain Métafiot

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