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dimanche, 22 novembre 2009

République Démocratique du Congo : un désastre humanitaire

 

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Plusieurs mois après la conclusion d'un accord de paix visant à mettre un terme au conflit dans la province du Nord-Kivu dans l'est de la RDC, des civils continuent d'être tués, violés, enlevés ou torturés par des groupes armés et des soldats des forces gouvernementales. Là-bas la guerre est sans fin pour les femmes et les enfants.

 

Malgré l' « Acte d'engagement » signé par des groupes armés le 23 janvier 2008, les combats ont repris et des enfants sont toujours enrôlés de force dans les milices, des femmes et des fillettes toujours victimes de sévices sexuels.

 


Retour en arrière pour comprendre comment on en est arrivé là. A la suite de l'échec de l'intégration dans l'armée nationale congolaise des troupes du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), qui dit défendre les tutsi congolais contre les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), groupes armés hutu rwandais présents au Kivu depuis 1994, le conflit a repris en août 2007, opposant le CNDP à l'armée nationale (FARDC) et aux milices communautaires Maï-Maï.

 

En novembre 2007 à Nairobi, le gouvernement de la RDC s'est engagé envers le Rwanda à démanteler les FDLR pour les rapatrier au Rwanda. A la suite d'une défaite des troupes gouvernementales contre le CNDP, une conférence sur la paix, la sécurité et le développement au Kivu a été réunie à Goma (Nord-Kivu). La négociation entre toutes les parties congolaises (sans le Rwanda ni les FDLR) a débouché sur un Acte d'engagement signé le 23 janvier 2008 par lequel tous les belligérants s'engageaient à un cessez-le-feu immédiat, à la démobilisation de leurs troupes, à l'arrêt des violences contre les civils. Un Programme Amani (paix en Swahili) a été établi pour la mise en œuvre de cet engagement.

 

 

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Le processus de Nairobi n'a guère été appliqué et le CNDP s'est retiré du programme Amani dès juin 2008, et a repris l'offensive en septembre, mettant les FARDC en déroute et parvenant à la porte de Goma. La Mission de l'ONU au Congo (MONUC) a été impuissante à maintenir la paix et à protéger les populations.

 

Pendant tout ce temps, les exactions contre les civils n'ont pas cessé, atteignant un paroxysme en octobre et novembre 2008 : homicides illégaux de civils, violences sexuelles décrites comme une pratique « institutionnalisée » au sein de toutes les forces et groupes armés, recrutements d'enfants soldats et ré-enrôlement d'enfants soldats démobilisés, et une situation humanitaire désespérée pour les populations déplacées ou réfugiées en Ouganda ; selon la MONUC on enregistrait 1 350 000 personnes déplacées dans le Nord-Kivu.

 

 

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L'esclavage des enfants soldats


Guillaume était en sixième année au lycée de Kitchanga quand il a été enlevé par des membres du CNDP en 2007 : « J'étais en cours quand des soldats du CNDP sont arrivés et ont rassemblés tous les garçons de sixième année. Ils ont pris douze d'entre nous âgés de plus de seize ans et ils nous ont emmenés dans le camp de Bwiza. Ils nous ont mis dans une fosse creusée dans le sol. Certains ont essayés de s'enfuir, mais ils nous ont battus. J'ai été frappé au ventre et ligoté. »


Les autorités estiment que 3000 à 6000 enfants sont toujours enrôlés dans les groupes armés en RDC, malgré l'Acte d'engagement. Parqués dans des camps, battus par leurs instructeurs, torturés ou tués pour servir d'exemple...les enfants soldats du Nord-Kivu endurent les pires souffrances.

 

 

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A titre d'exemple, des membres des forces de sécurité gouvernementales ont détenu des enfants soupçonnés de combattre au sein de groupes armés et, dans certains cas, ils les auraient torturés et maltraités. Trente-et-un enfants, dont certains de nationalité rwandaise, qui auraient été enrôlés dans les forces du CNDP, ont été transférés en décembre 2007 et en janvier 2008 à bord d'avions militaires à Kinshasa où ils ont été détenus dans des conditions inhumaines dans la prison centrale (CPRK).

 

Ludovic, un enfant qui a suivi ce genre d'entraînement, estime que sur les 250 personnes qui se trouvaient avec lui dans le camp, 60 étaient des enfants dont un petit nombre de filles : « L'entraînement était dur. On nous donnait un plat de maïs par jour à partager entre douze personnes. Certains sont morts de maladie ou par manque de nourriture. D'autres ont été tués quand ils ont tentés de s'évader, ils les ont fusillés en public à titre d'exemple. Ils nous ont obligés à creuser des trous et à enterrer les corps, à côté de l'endroit où ils avaient été tués. »


 

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L'horreur des violences sexuelles


Dans le Nord-Kivu, des femmes, des jeunes filles, parfois même de jeunes hommes et des petits garçons, continuent d'être victime de viols et d'agressions perpétrés par toutes les forces et groupes armés belligérants. Beaucoup ont subi des viols collectifs ou ont été violés plusieurs fois. Des viols sont commis en public, en présence des proches de la victime dont des enfants. Des femmes ont également été enlevées pour servir d'esclaves sexuelles.

 

Bien souvent, ces viols visent à terroriser les communautés soupçonnées de soutenir les groupes rivaux. On note aussi une augmentation régulière des viols commis par des civils, qui sont à considérer comme une conséquence directe de la persistance du conflit et de l'impunité.

 

L'ONU rapporte que 350 viols sont déclarés chaque mois dans le Nord-Kivu, les enfants de moins de 18 ans représentant environ un tiers des victimes. Bien entendu, c'est sans compter les dizaines d'autres non déclarés par peur de représailles.

 

 

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Julia, 18 ans, issue d'un village proche de Butuhe, territoire de Beni territory, a affirmé qu'elle avait été violée le 25 octobre 2007 : « Il était trois heures de l'après-midi, je préparais de la farine de manioc dans les champs, avec ma fille de neuf mois sur mon dos. Trois Maï-Maï armés se sont approchés. Ils m'ont frappée et je me suis mise à crier. Puis ils m'ont attachée et m'ont enfoncé un morceau de tissu dans la bouche pour que personne n'entende mes cris. Les trois hommes m'ont violée. Puis ils m'ont laissée partir en me disant de ne parler à personne de ce qui c'était passé. Je ne voulais pas me faire soigner ni recevoir un soutien psychologique, mais j'ai commencé à avoir des crampes dans le ventre et des vertiges. Tout mon entourage m'a soutenue parce que d'autres personnes avaient aussi été violées par des Maï-Maï. La communauté est en colère parce que les responsables ne sont pas punis. J'ai revu les hommes qui m'ont violée et j'ai très peur. Ils sont passés plusieurs fois dans mon village. Je n'ose plus travailler dans les champs loin du village et je reste près des autres. »

 

Sylvain Métafiot


Source : Amnesty International

 

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