Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mardi, 29 mai 2018

Fragments d’un exil amoureux : Seule sur la plage la nuit de Hong Sang-soo

hong sang-soo,sylvain métafiot,seule sur la plage la nuit,fragments d'un exil amoureux, Raskar Kapac,

 

Article initialement publié dans le 10e numéro de Raskar Kapac

 

« Il faut mourir avec élégance », répète Younghee en portant la bière à ses lèvres, main sur le front et regard triste, passablement éméchée par l’alcool et usée par une déception amoureuse. « Personne n’est qualifié pour l’amour ! » ajoute-t-elle, exaspérée, à ses amis réunis autour de la table, installant un moment de gêne rapidement dissipé par un baiser saphique et une cigarette partagée sous la pluie. La joie reprend ses droits, pour un temps au moins. Aucun doute, nous sommes bien chez Hong Sang-soo. Promenades nocturnes en pleine ville, conversations sur la dilution des désirs dans le temps et la contrariété des sentiments qui refont surface, variations infimes des destinées, rencontres incongrues et repas bien arrosés, le style du réalisateur coréen est aisément repérable pour le spectateur qui, de films en films, accompagne ses personnages débonnaires et mélancoliques au gré de leurs beuveries mi-pathétiques mi-truculentes. Son dernier long-métrage, Seule sur la plage la nuit, ne fait pas exception. Et l'on retrouve – quelques mois à peine après la sortie du Jour d'après et avant la sortie de La Caméra de Claire – cet art délicat de filmer l'ébranlement des passions amoureuses par une mise en scène épurée et un regard caressant qui, s'il privilégie les plans fixes, joue des mouvements formels pour distiller une bizarrerie burlesque au sein de cette fable tragi-romantique.


Si fait, d’un hochement de caméra, d'un léger balayage de droite à gauche, les personnages se perdent dans leurs songes ou disparaissent du champ (ce qui revient au même). D’un zoom, la détresse de l’une se fige, la honte d’un autre devient palpable et le Quintette en ut majeur de Schubert retentit, étreint les cœurs. D’un changement de perspective, la même scène ouvre une nouvelle gamme dans la répétition de gestes et de paroles anodines, inclinant les personnages vers une toute autre fatalité. Si Hong Sang-soo s'amusait délibérément, à la faveur des variations d'angle, avec le thème du dédoublement dans Un jour avec, un jour sans et dans Yourself and Yours, il laisse ici son héroïne se perdre sur les rives hivernales des rêves enfouis, faisant de l’épuisement existentiel, plus que de la gémellité sentimentale, l’étoffe sablonneuse sur laquelle elle imprime son vague à l’âme. Portrait d'une jeune fille solitaire hantée par ses fantasmes, le récit brode ainsi une brisure intime sur des souvenirs épars, un désenchantement doux et amer face à l'absurdité du monde. En somme, le motif sublimement incarné de la désillusion des certitudes.


Sylvain Métafiot

jeudi, 25 février 2016

Raskar Kapac : nouvelle gazette artistique et inflammable

gazettarium, litterarium,acte créateur, Bernanos, Christian Dedet, de mollesse spirituelle, Jean-René Huguenin, journal posthume, La Côte sauvage, morosité intellectuelle, Nietzsche, nouvelle gazette artistique et inflammable, Raskar Kapac, solitaire lumineux, sylvain métafiot, Turin, une autre jeunesse,

Article initialement publié sur Le Gazettarium

 

L’arrivée d’une nouvelle publication à vocation artistique est un petit événement dans un secteur de la presse saturé de périodiques consacrés à l’automobile, aux sports, aux voyages, au bien-être, à l’actualité culturelle, à la chasse, aux régimes minceurs, etc. Mettant un point d’honneur à valoriser le beau style littéraire et refusant de coller à l’actualité, Raskar Kapac n’a pas la prétention universitaire d’une revue ni l’aspect parfois racoleur des magazines. C’est une simple gazette de huit pages, dénuée de publicité, ayant pour volonté « de faire resurgir en pleine lumière quelques artistes incendiaires qui nous ont enseigné la puissance libératrice de la création ». La profession de foi est claire : « Dans une période de morosité intellectuelle, de mollesse spirituelle, nous croyons en une résurrection par le feu de l’écriture ! Dans une époque qui nie toute verticalité, nous affirmons le caractère révolutionnaire de l’acte créateur. » Pour ce premier numéro, c’est l’écrivain Jean-René Huguenin qui à l’honneur d’allumer la mèche.

Lire la suite