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jeudi, 04 décembre 2008

« La prison a l’avantage de produire de la délinquance »

Foucault1.jpg

 

 

Cette citation est de Michel Foucault, dans La société punitive, Dits et écrits (II).

 

Pour le théoricien du biopouvoir, la prison, loin de réduire la délinquance, s’inscrit plutôt dans une théorie de la surveillance généralisée de la société sur ses membres. Prend des notes Dati.


La détention provoque la récidive. C’est le constat auquel se livre Foucault, chiffres à l’appui. Vers 1820, 38 % de ceux qui sortent des maisons centrales sont à nouveau condamnés, et environ 1 condamné sur 4 est un récidiviste.


Le bilan ne cesse de s’alourdir tout au long du XIXe siècle, qui marque pourtant l’avènement de la prison au détriment de toutes les autres formes de punitions – châtiments corporels, travaux forcés, galères, bannissements.

 

Jusqu’à aujourd’hui : avec un taux de récidive s’élevant à 52 %, les prisons, loin d’être délaissées, souffrent de surpopulation. Cercle vicieux ? Incohérence ?


Dans la suite de l'article d'autres questions...


Selon les textes des théoriciens qui ont contribué à son avènement, l’objectif du système carcéral est pourtant clair et sans équivoque : en permettant aux condamnés d’avoir le temps en cellule de faire leur examen de conscience, il est censé permettre le retour à la vertu et à la normalité pour ceux qui en sont sortis.

 

Si ces objectifs ne sont pas remplis, pourquoi s’être entêté et avoir fait de la prison cette institution incontournable ?

 

Foucault propose, avec cette phrase étrange, de retourner le problème, de nous interroger non plus sur les raisons de cet échec, mais sur sa fonction, en replaçant le système carcéral au sein d’un système plus global.

 

La question que se pose la société moderne, et à plus forte raison contemporaine, n’est pas tant « comment corriger ? » que « comment contrôler ? ».


A travers l’étude des formes de surveillance des comportements déviants, de L’histoire de la folie à Surveiller et punir, Foucault abouti à une thèse du biopouvoir, selon laquelle le schéma marxiste de domination brutale et visible d’une classe par une autre se verrait remplacé par la théorie d’une surveillance généralisée de la société sur chacun de ses membres, jusque dans les moindres détails de leur vie – de l’école à l’hôpital, en passant par la prison.


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Cette dernière incarne ce pouvoir anonyme sur la vie de chacun. Un contrôle de chaque instant y est exercé sur les individus. Pendant la détention, tout d’abord par une gestion du temps et de l’énergie, mais une fois sortis, par un fichage et un réseau de surveillance serré ôtant toute liberté d’action.

 

Pris dans les rouages de ces mécanismes de stigmatisation et d’exclusion, les anciens détenus n’ont alors le plus souvent que deux possibilités : se laisser intégrer au système de surveillance, comme indicateurs, provocateurs, etc., ou passer outre et retomber dans l’infraction.

 

En bref, retourner en prison ou y envoyer les autres. D’un côté comme de l’autre, aucun ne sort du champ de contrôle.


Facile à délimiter, donc à désigner, cette catégorie de population que constitue la délinquance se révèle finalement bien moins dangereuse qu’une somme d’irrégularités individuelles, infimes, mais suffisantes, à terme, pour enrayer un système fondé sur la normalisation et la sanction de ce qui s’en écarte.

 

Si la prison échoue à supprimer le crime, elle réussit à produire une forme d’illégalisme contrôlable, et même récupérable. Du recyclage, en somme.


Sylvain Métafiot


Source : Eléonore Clovis, Philosophie magazine, n°22, septembre 2008

 

Commentaires

 

Juste une question : châtiments corporels, travaux forcés, galères, bannissements et autres seraient alors préférables à l'emprisonnement ?

 

Non, bien sûr que non.
Exposer les graves problèmes de la prison ne veut pas dire revenir aux temps des pratiques archaïques, voire barbares de punitions.
De la même manière, s'inquiéter des ravages de la technique sur l'environnement écologique ne signifie pas un retour à la bougie (même si certains écolos extrêmes et minoritaires le souhaitent).
Il convient surtout de réfléchir à une amélioration radicale du principe d'emprisonnement, pour, qu'à terme, la prison devienne une institution à la marge de nos sociétés démocratiques.

 

Effectivement, Alexis, la prison a pour but de resociabiliser et réinsérer les délinquants afin qu'ils puissent reprendre une vie de mouton...hum...normale après avoir payé leur dette à la société.

Malheureusement, cela nécessite des ressources financières et humaines, beaucoup de ressources. Et les hommes (et femmes ;-) ) y travaillant doivent faire preuve d'une certaine ouverture d'esprits tout en restant ferme et d'une certaine dévotion à une telle tache...pas une position de domination, répression et humiliation.

Actuellement les prisons, c'est une dégradation (si cela est encore possible) de l'image de l'autorité et un échange "d'expérience" criminelle, ainsi qu'un endurcissement des personne dû à l'ambiance générale et la surpopulation. En appliquant cela à des ados en pleine cette de personnalité...c'est la cata.

 

Il y a longtemps que je cherche une solution palliative à l'emprisonnement sans vraiment l'avoir trouvée. Il faut dire que dans mon CV j'ai commencé ma carrière professionnelle comme sous-officier à la Gendarmerie royale Belge, aujourd'hui dissoute au profit d'une certaine police fédérale.
La fréquentation des milieux carcéraux en temps qu'approvisionneur ne me plaisait guère à l'époque et aujourd'hui je reste sceptique sur l'utilité de l'emprisonnement dans de nombreux cas.
Il existe sûrement un tas de choses que les détenus pourraient faire sans être de réelles menaces pour les bons citoyens. Malheureusement nous ne trouvons dans nos chers dirigeants actuels aucun espoir d'ouverture d'esprit. La garde des sceaux et le garde des sots ne nous laissent guère espérer de réels changements positifs dans la politique carcérale française. Lorsque l'on pense que madame Dati propose d'emprisonner les enfants dès l'âge de 12 ans et que l'on se souvient du quasi défunt fichier edvige on ne peut que douter de leurs capacités d'entendement d'une société libre et ouverte. Pourtant je ne crois pas que l'on naisse délinquant, je crois que l'on devient délinquant par faute d'instruction, manque d'éducation, avec l'aide des copains plus âgés ou plus délurés ... ou parfois parce que l'on a pas vraiment le choix. La vie des gamins des favelas du monde entier offre peu d'alternative à la délinquance juvénile. Seuls les plus courageux s'en sortent souvent après bien des déboires. Les prisons ou les écoles de redressement ne sont que des lieux confinés et de mauvaises rencontres où la vie sociale observe des règles strictes et incompatibles avec l'espoir d'une réinsertion facile.
Peut-être que suite à une pause café prolongée viendront les idées de rechange à soumettre à nos gentils dirigeants ?

 

La question de l'efficacité des prisons n'est pas aussi simple et les palliatifs ne sont pas uniquement les châtiments corporels, le bannissement et les travaux forcés. Il existe, en effet, pas moins de 17 autres possibilités qui s'offrent au procureur lorsqu'il est face à un délinquant. Et croyez moi, la prison pour délinquance est très rarement une solution que choisi le procureur ou le juge d'instruction.
Il choisira, d'abord, de préférence des travaux d'intérêt généraux(ramasser des déchets dans la rue, enlever des tags sur des facades...ect..) et pour les mineurs c'est souvent un encadrement socio-scolaire ou alors des stages sur les effets néfastes de la drogue (si c'est le sujet de sa délinquance)ou des stages sur le civisme. Si le délinquant passe devant le juge (ce qui n'est pas toujours le cas contrairement à ce que beaucoup pense), la peine maximum pour première délinquance est souvent une amende assez élevé pour culpabiliser l'individu mais pas assez pour le ruiner et quelque fois cette amende est accompagné de la fameuse peine de prison avec sursis.
La prison est réellement une solution de dernier recours qui n'est appliquée, très souvent, qu'en cas de récidive avérée.
La question est alors : "est ce que la prison n'aggraverais pas encore plus le cas du délinquant récidiviste ?"
Je pense également que la prison n'est pas le lieu où l'on doit traiter la délinquance car la prison est, à mon avis, un lieu où nait la délinquance et souvent même le crime. En effet, très nombreux sont les prisonniers qui lors de leurs sorties de prison sont encore plus "armé" qu'avant d'être rentrée et ont moins peur du délit et du crime.
Il n'est, en effet, pas rare de trouver des délinquants récidiviste qui se sont fournis des armes ou de la drogue sur des tuyaux d'anciens partenaires de prison. Et quelques fois même la prison est un endroit très sure pour préparer les futurs casses ou trafic des braqueurs ou dealeurs.

La prison convient à ceux que l'on doit écarter de la société parce que rien ne peut les "sauver" (c'est le cas de ceux que j'appelle les grands meurtriers impulsifs et incontrôlables. Attention, je ne classe pas les pédophiles dans cette catégorie puisque très souvent la pédophilie est la conséquence de sévices sexuelles graves subi par le pédophile durant sa jeune enfance. De très bonne solution clinique existe, si la pédophilie est détectée à temps. Juste pour information, la pédophilie se détecte très rapidement et très jeune entre 7ans et 15ans. Bien sur tous les pédophiles ne sont pas détectés à cet âge malheureusement.)
Dans ce cas, la prison est en effet un instrument de contrôle sur une partie de la population que l'État ne peut contrôler qu'en quarantaine.

Quelles mesure seraient alors efficace contre la délinquance?
Je pense qu'il n'y a rien de pire, pour la délinquance, que la prison. Savoir quel remède pour éviter la récidive est une autre question à laquelle je n'ai pas de réponse.
Une chose est sure : La récidive nait une fois sur deux en prison et c'est souvent la prison qui fournis les "armes" aux futurs délinquants récidivistes.
Laissé la possibilité au procureur de choisir une peine adaptée est le bienvenu mais encore très méconnu, la preuve est que vous n'en parlez pas. Et pourtant, comme je le disais il est rare que le procureur enferme les primo délinquants de la société, même lorsqu'il y a préjudice corporel sur une victime.

 

Le deal est simple : tout faire pour ne pas y aller.

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