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mardi, 26 décembre 2023

Le labyrinthe des ombres : Limbo de Soi Cheang

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Dix-sept ans après le terrassant Dog Bite Dog (2006) dans lequel une chasse à l’homme s’engageait entre un inspecteur au bord de la folie et un meurtrier enragé, Soi Cheang adapte le roman chinois Wisdom Toot de Lei Mi et plonge à nouveau dans les bas-fonds de Hong-Kong avec Limbo pour une apnée de deux heures dans les eaux putrescentes du crime.

 

Soit un vieux flic désabusé proche de la retraite (Cham Lau) et son jeune supérieur fraichement débarqué à la brigade criminelle (Will Ren) à la recherche d’un tueur en série s’en prenant exclusivement aux femmes et laissant systématiquement leur main gauche coupée en guise de signature. À mesure que l’enquête progresse, les deux policiers que tout oppose s’aventurent toujours plus profondément dans la ville à travers un dédale infernal de ruelles sombres et malfamées. Esthétiquement, le film est d’une beauté rare et dérangeante. L’usage du noir et blanc enténèbre une Hong-Kong viciée par le mal dont la pluie gluante souille chaque recoin et les ordures recouvrent la moindre parcelle de bitume. Une véritable décharge à ciel ouvert opérant une fusion formelle entre la topographie des lieux et les personnages eux-mêmes : la pourriture envahit littéralement tout l’écran.

 

Oppressés par cette montagne urbaine de béton et de déchets sur laquelle le soleil peine à darder ses rayons les inspecteurs en viennent à perdre tout sens moral en se servant d’une petite délinquante (Yase Liu) pour appâter le démembreur sadique. La situation devient encore plus étouffante lorsqu’on découvre la haine féroce que Cham voue à cette junkie, responsable de l’accident qui envoya son épouse dans le coma… La jeune femme cristallise jusqu’à l’excès toute la violence crasse de l’époque à travers les affects de vengeance, de culpabilité et de rédemption.

 

Accompagné de la scénariste Au Kin-yee, du directeur photo Siu-keung Cheng – tous deux ayant travaillé sous la houlette de Johnnie To – et du légendaire compositeur japonais Kenji Kawai, Soi Cheang reprend à son compte les codes classiques du polar tendance hard-boiled pour imposer une vision dantesque d’une mégalopole décadente et tentaculaire dans laquelle tous les protagonistes semblent courir à leur perte. Celle d’une Chine post-industrielle ensauvagée par la lutte capitaliste de tous contre tous, la misère grouillante, la haine maladive des femmes et le désespoir pour seul horizon. Entre chronique sociale et polar formaliste Limbo constitue le contrepoint cathartique le plus radical de son auteur face aux ambitions mortifères d’un régime politique menaçant toute l’industrie hong-kongaise du cinéma.

 

Sylvain Métafiot

 

Article initialement publié sur Le Comptoir

samedi, 20 juin 2009

Un Johnny peut en cacher un autre

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Titre énigmatique ? Les cinéphiles auront compris qu'il est question du dernier film de Johnnie To (une cinquantaine de films au compteur) avec notre Johnny Halliday national en tête d'affiche : Vengeance (Revenge). N'étant absolument pas fan du chanteur fatigué qui se prend pour un rocker mais complètement accro du cinéaste Hongkongais, je me suis empressé de découvrir la nouvelle réalisation d'un des maîtres du genre. Le scénario ? Johnnie To travail parfois sans, non sans succès, tant il est vrai que sa spécialité réside dans l'excellence de sa mise en scène dynamique et stylisée. Celui de Vengeance pourrait se résumer à son titre : « Après le massacre de sa famille (Sylvie Testud, son « mari » et ses « gosses »), un cuisinier français, ex-tueur à gages, Francis Costello (Johnny Halliday), engage trois hommes pour l'aider à se venger. Dans une ville qu'il ne connaît pas, il va tout faire pour s'organiser et retrouver le goût des armes. »

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