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dimanche, 29 mars 2009

Interview Eric Dacheux : L'Europe et nous !

 

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L'équipe de mapausecafé, a eu le plaisir d'aller interviewer un chercheur, ce qui risque d'être de plus en plus rare, savourons donc notre chance.

C'est un européen dans l'âme et un professeur que nous sommes allés voir.


Pour lire l'interview veuillez cliquer ici !


Mr Dacheux, tout d'abord merci d'avoir répondu à notre interview, pouvez vous vous présenter à nos lecteurs ?

Photo ED.JPG

Eric Dacheux :

J'occupe la moitié de mon temps à la recherche et un autre à enseigner à l'université Blaise Pascal de Clermont Ferrand.

J'anime par ailleurs un groupe de recherche « communication et solidarité » qui réfléchit sur les liens pluriculturels dans les sociétés démocratiques.

J'ai dirigé au CNRS, au laboratoire communication et politique fondé par dominique Wolton, une équipe intitulée « Espace public européen » de 2000 à 2004

 

 

Enfin j'ai longtemps milité dans l'économie solidaire : dans les C.I.G.A.L.E.S (club d'investissement et gestion pour une alternative locale de l'économie solidaire) et dans des SEL (systèmes d'échanges locaux)

 

Je suis aussi l'auteur de « L''impossible défi : la politique de communication de l'UE »

«  Association et Communication : critique du marketing »

Les deux ouvrages sot parus à CNRS éditions

 

Enfin je suis le rédacteur en chef d'une collection qui s'adresse aux étudiants, afin de démocratiser le savoir et de lutter contre la vulgarisation des informations comme Internet le permet bien souvent. Nous publions 9 livres gratuits, qui sortent par série de 3, par an, pour les étudiants. Cette collection se nomme les Essentiels, les trois prochains numéros qui sortent en mai sont : l'audience, télévision la machine à communique, la réception.

 

MPC : Concernant la réforme de l'université et la grêve, qu'en pensez vous ? Pensez vous qu'il faut une réforme mais qu'elle n'est pas la bonne ?

 

E.D. : J'étais en grêve et je le serai de nouveau le 19 mars, je ne considère donc pas cette réforme comme bonne ! L'idée de mettre en concurrence l'université et enseignants, une idée libérale ne me convient pas. A l'inverse à l'université l'important c'est la collaboration. Sans elle, on se tire une balle dans le pied.

Par exemple, lorsqu'on avait mis les 2 laboratoires français et américains en concurrence sur la recherche contre le SIDA, cela fut dramatique, les conséquences engendrées par celle ci, se sont chiffrés en centaine de morts.

 

Pour l'université, oui, il faut une réforme, mais une autre réforme. Il existe des propositions, le collectif « sauvons la recherche » en faites de très pertinentes. Mais je le reconnais, ce n'est pas à nous, étudiants, chercheurs, de faire la loi, mais le gouvernement doit négocier avec nous avant de décider quelque chose.

 

MPC : Vous parlez de l'Europe et de sa politique de communication, finalement, n'y a-t-il pas un problème grave de communication entre les « technocrates ou bureaucrates » de Bruxelles et le reste de la population ?

 

E.D. : Pour moi le problème ne vient pas de la communication car elle existe, simplement, il s'agit d'un manque de connaissance des citoyens. Cela est dû principalement au manque d'instruction civique sur l'Europe.

Le problème de la crise politique européenne est basé essentiellement sur le fait que l'Europe ne répond pas aux questions essentielles et que toutes les institutions ont des problèmes internes.

MPC : Pourquoi si peu de gens s'intéressent aux élections européennes, serait ce un désaveu de l'Europe ?

 

E.D. : La faible participation reflète une méfiance vis à vis de l'Europe. Mais permettez moi de relever une contradiction assez significative, malgré le taux affiché, beaucoup de gens s'intéressent à l'Europe. La preuve en est lors du référendum de 2005, malgré le « Non » les gens se sont intéressés et interrogés sur l'Europe, car il y avait de réels enjeux.

Mais le mode d'élection de l'UE choisit est aberrant, ce n'est pas un jour commun à toute l'Europe, il n'y a finalement que des enjeux nationaux plutôt qu'européens.

Les partis politiques ne donnent pas la priorité à l'Europe, il n'y a d'ailleurs que deux partis européens, le PSOE (parti socialiste) et les Verts. A droite, aucun parti ne s'engage sur l'Europe.

 

MPC : Maintenant que la paix est devenue réalité en Europe, à quoi cette incroyable  « machine » peut bien servir ?

 

E.D. : La question n'est pas tranchée pour les élites, on a par défaut un marché car c'est finalement le plus simple à construire. Il manque une utopie, c'est ça que j'essaie de démontrer dans mes recherches. L'économie solidaire serait à mon sens l'utopie la plus constructive.

 

 

 

MPC : L'Europe a-t-elle sa place dans le monde ? Peut on espérer à juste titre une Europe Fédérale ou une Europe non fondée sur l'économie mais d'abord sur la politique et la vie des citoyens ?

 

E.D. : L'Europe a du poids, car elle reste le premier marché mondial, mais reste une faible entité politique même si des choses se font telles que la citoyenneté européenne ou le représentant européen unique dans les organisations mondiales type OMC.

 

MPC : M. Barrosso est souvent critiqué et selon beaucoup à juste titre, pensez vous que la fin de son mandat va pouvoir accélérer le renouveau européen ?

 

E.D. : Les états on plus de pouvoir que lui, et sa tâche reste très compliquée, il n'a qu'une marge de manœuvre limitée et n'est pas indépendant.

Par rapport aux jeunes, leurs esprits sont plus ouverts, mais il y plus d'interrogations aussi car ils n'ont pas connu la guerre et ce demande quelle est la raison d'être de l'UE Je pense qu'il faudrait renouveler cette « élite européenne ». La droite domine en Europe, et M.Barrasso est donc conforme à la droite européenne. (ndlr : puisque nommé par celle-ci)

 

MPC : Comment faire pour que chaque européen se sente avant tout européen, et que l'on voit dans chaque ville européenne une réelle atmosphère européenne comme dans certaines villes comme Strasbourg ?

 

E.D. : Il faut du temps. Tout ceci passe par l'école, les jumelages, les voyages (Erasmus). Aujourd'hui de plus en plus de gens sont en mouvement dans l'Europe, et les flux européens, et l'histoire se construira par la mixité sociale. Un espagnol marié à une suédoise faisant un enfant en Lituanie par exemple participerait à la construction européenne.

Mais Europe ou pas, nos villes sont déjà pluriculturelles, à Clermont Ferrand on pourrait citer les 30% d'étudiants étrangers. Certains se considèrent citoyens du monde, d'autres européens, et d'autres originaires d'une ville, enfin certains font un amalgame de tout ceci.

 

 

MPC : Comment expliquer que certains européens soient impliqués dans des affaires « peu catholiques » tels que «l'affaire Trichet» par exemple, pourquoi ne pas montrer aux eurosceptiques que l'Europe c'est avant tout autre chose ?

 

E.D. : Bien entendu il faut que les élites soient irréprochables, par contre l'Europe manque cruellement de personnes, 27000 fonctionnaires pour gérer 27 Etats, soit autant que le nombre de fonctionnaires de la ville de Paris, donc ceci expliquant cela, les tentations deviennent plus fortes lorsqu'on sait que l'on a besoin de nous....


MPC : Pour finir sur l'Europe, quelle est pour vous la priorité de l'Europe pour le 21ème siècle ? Peut on penser que la crise va radicalement changer la donne ?

 

E.D. : Il faut, comme je l'ai déjà précisé, trouver une nouvelle utopie, un projet collectif d'envergure, qui fasse que les citoyens se sentent bien. La crise précipitera peut être l'Europe vers une nouvelle utopie...

 

 

MPC :Le traité peut il être adopté et si oui quelles en seront les conséquences ? ( oubli de cette question lors de l'interview ) Pourquoi l'Europe n'est elle pas démocratique, le traité est voté par les parlements, le système de vote à l'unanimité est lui aussi critiqué,ne faudrait il pas changer tout ceci ?

E.D. : L'Europe sacrifie aujourd'hui la démocratie (le gouvernent du peuple par le peuple) sur l'autel de la gouvernance (efficacité des décisions). Elle est légale (respecte les procédures démocratiques) mais elle n'est pas légitime (respecter par les citoyens). En réalité on veut aller trop vite.

 

MPC : L'avenir de l'Europe est il à l'Est, ou au Sud ?

E.D. : Quel est le territoire de l'Europe, c'est avant tout ceci qu'il faut définir. Pour moi, l'Europe pourrait renouveler son désir de paix en s'étendant au Sud, sur tout le pour tour de la méditerranée

MPC : Avez vous un dernier message à faire passer à nos lecteurs ?

 

E.D. : Lisez, lisez lisez, il y a des dizaines façons de s'informer, mais le livre est indispensable pour pouvoir comprendre le monde qui nous entoure.

 

Merci M. Dacheux pour vos réponses, il est toujours intéressant pour nous d'agrémenter notre blog par des points de vue extérieurs sur des sujets que nous voulions traiter.

 

Eric Dacheux, professeur en sciences de l'information et de la communication. Université Blaise Pascal, Clermont FD

 

 

Commentaires

 

Cela peut paraitre paradoxale, mais l'Europe est la seule utopie politique réaliste de nos jours.
En réalité, toute utopie est dictatoriale (trop long à développer, on verra une autre fois) ; mais concernant l'Europe, dans sa future forme fédéraliste j'espère, on peut parler d'utopie politique communautaire ou de l'unique idéal de vivre ensemble d'un continent qui vaille la peine de se battre pour.
De ce point de vue, le traité instituant une constitution pour l'Europe, malgré ses imperfections, notamment économiques, allait dans le bon sens de cet idéal.
En ce sens, les Etats-Unis d'Europe est un objectif concret qui devrait susciter la passion des européens (qui devraient effectivement lire beaucoup plus et arrêter de fantasmer sur la technocratie-bruxelloise-loin-de-nos-préoccupations). Mais on en est loin...

 

L'europe est trop compliquée à construire et à comprendre ! Elle ne se fera pas en un jour c'est sur ! La constitution aurait pu être bien sous certains points mais tant qu'elle aura simplement comme objectif de faire un marché unique énorme ça ne sera pas possible....

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