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lundi, 13 octobre 2008

Mélancolie New-Yorkaise

C’est de cette façon que l’on pourrait traduire The Wackness, le deuxième film indépendant de l’américain Jonathan Levine (après All The Boys Love Mandy Lane) et récompensé par le prix du public au festival de Sundance.

 

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Encore un film de gosse mal dans sa peau qui tente de s’en sortir ? C’est le postulat de départ en effet mais ici le ton ne tourne pas au misérabilisme névrotique ou à la comédie débile. Scotchés aux baskets du « héros », Luke Shapiro (Josh Peck), nous allons suivre sa rencontre avec le Dr Jeffrey Squires (Ben Kingsley excellent). Le 1er est un jeune dealer d’herbe fraîchement diplômé du lycée, en proie à une douce tristesse : uniquement vu comme le fournisseur officiel d’herbe pour les fêtes étudiantes, il se sent seul. Il n’a jamais vraiment eu d’expérience sexuelle concluante. Ses parents sont en perpétuel conflit, et risquent de se faire expulser de leur appartement New-Yorkais. Le 2nd est un psy qui monnaye ses séances contre quelques grammes de marijuana. Son couple bat de l’aile (Famke Janssen en épouse froide comme son carrelage) et sa cinquantaine n’est pas tout à fait rugissante. Ces deux paumés vont se lier d’amitié, mais le béguin de Luke pour la belle fille du docteur Squires, la pétillante Stéphanie, risque d’égratigner leur complicité naissante…

 

Une des idées de génie est que le film est une anté-fiction, c’est-à-dire que le cadre spatio-temporel se trouve être le New-York 1994, lorsque Rudolph Giuliani, récemment élu, décide de nettoyer la ville (au karcher ?) en déclarant la guerre au bruit, à l’alcool, aux tags, aux SDF. Ce n’est pas une « histoire vraie » ou un film post 11 septembre mais bel et bien une plongée dans les années 90 à l’époque des walkmans, des téléphones avec fil, de la super Nintendo (pourquoi ai-je revendu la mienne ?!) et surtout du Hip-hop. Le rap imprègne totalement le film lui donnant une ambiance cool et funky. La BO est de qualité : aux platines, des classiques US tels Notorious B.I.G, Wutang Clan (terrible !), NAS, Biz Markie, A Tribe Called Quest (incontournable), etc.

 

On prend un véritable plaisir à suivre les pérégrinations de Luke et Jeff atteints du syndrome du Wakness (strabisme mental qui vous fait voir les choses en noir) dans ce New-York jazzy mais en phase de lobotomisation en supprimant tout « ce qui dépasse » au profit d’une propreté formatée au tourisme et aux golden boys. Grâce à la qualité des interprètes l’humour est omniprésent, certaines séquences étant à mourir de rire. D’autres font simplement grimper le sourire jusqu’aux oreilles : l’euphorie après le premier baiser résonne dans la tête de tous les mecs et est ici génialement mise en scène.

 

La mélancolie qui parcoure le film peut se résumer à la question que se posent nos deux protagonistes « Comment habiter un monde dans lequel on ne se reconnaît pas ? » et à leur désir d’évasion permanent. Comme le résume Jean-Baptiste Thoret : « Pour Jeffrey Squires, la contre-culture n’est plus. Comment en faire le deuil ? Pour Luke, le problème est inverse, ou plus grave : comment se constituer lorsque le contre n’est plus possible ou est juste un simulacre ? » Un des meilleurs exemples de cette dramatique évolution se constate à travers la bande-son Hip-hop : les bons artistes (proliférant il y a 20 ans) se font rares de nos jours, le gangsta-rap sans saveurs ayant tout ravagé sur son passage. Anyway, Go to the Big apple man !

 

 

Sylvain Métafiot